Vendredi 7 février, le Conseil d’État a considéré que les plantes obtenues par mutagénèse sont des OGM. Il a donné six mois à la France pour changer sa réglementation et suspendre la culture de ces plantes.

Dans la lignée de la Cour de justice européenne, il a donné raison aux neuf organisations paysannes et de la société civile qui l’avaient saisi en 2014 à ce sujet. Les associations demandaient que les plantes obtenues par les nouvelles techniques de mutagenèse — aussi appelées « OGM cachés » — soient considérées comme des OGM « classiques », et donc soumises à la même réglementation stricte.


En juillet 2018, la justice européenne tranchait sur les organismes génétiquement modifiés (OGM) obtenus par mutagénèse : « Ce sont bien des OGM, ils doivent être réglementés comme tels », décidait-elle. Un an et demi après, le Conseil d’État français a repris cette conclusion à son compte et a demandé à la France de s’y conformer.

Ainsi, il a confirmé que les organismes obtenus par certaines techniques de mutagénèse doivent être soumis à la réglementation relative aux OGM. Ils doivent donc être assujettis aux évaluations sanitaires et environnementales avant toute mise sur le marché. Ils doivent aussi répondre aux obligations d’information du public, d’étiquetage et de suivi.

Certains de ces « OGM cachés » sont des variétés de plantes rendues tolérantes aux herbicides (VRTH). Le Conseil d’État a estimé qu’en vertu du principe de précaution, « le Premier ministre ne pouvait refuser de prendre des mesures de prévention pour l’utilisation de variétés de plantes rendues tolérantes aux herbicides. »

D’après les chiffres de l’Agence de sécurité sanitaire (Anses), les variétés rendues tolérantes aux herbicides représentent, en France, entre 20 et 30 % des surfaces de tournesol et 2 à 5 % des surfaces de colza. la décision des juges pourrait ainsi entraîner la fin de la commercialisation et de la culture de certaines de ces plantes.

Dans un communiqué, le gouvernement a déclaré qu’il allait « étudier de manière approfondie la décision du Conseil d’Etat, afin de la mettre en œuvre en prenant en compte l’avis de l’Anses du 26 novembre dernier et conformément à la réglementation européenne. »

Pour 27 organisations de la filière agricole, parmi lesquelles les semenciers et les syndicats agricoles majoritaires (FNSEA, JA), cette décision «  soulève de nombreuses interrogations techniques susceptibles d’entraîner une insécurité juridique et un potentiel frein à l’innovation », ont-elles affirmé dans un communiqué. Elles ont demandé au gouvernement d’attendre la fin des travaux lancés il y a peu par la Commission européenne pour mettre à jour sa réglementation.

Les associations requérantes se sont pour leur part félicitées de cette décision du Conseil d’État « qui fait passer la santé et l’environnement avant les intérêts économiques de quelques firmes semencières et productrices de pesticides ». Elles ont dit «  attendre du gouvernement qu’il applique enfin la loi en respect du principe constitutionnel de précaution ».

 

Source : Reporterre