En dépit des protestations des agriculteurs locaux, la Thaïlande a décidé, mardi 22 octobre, d’interdire trois pesticides dangereux. La commission thaïlandaise des substances dangereuses a voté l’interdiction du glyphosate, du chlorpyrifos et du paraquat. « L’interdiction entrera en vigueur le 1er décembre », a déclaré à la presse le président de la commission, Panuwat Triangjulsri, représentant du ministère de l’industrie. Une décision saluée par le réseau de vigilance sur les pesticides thaïlandais, qui militait de longue date pour l’interdiction.

L’agriculture emploie 40 % de la population thaïlandaise. Ce pays d’Asie du Sud-Est est l’un des plus gros exportateurs mondiaux de riz et de sucre mais aussi l’un des plus gros consommateurs de pesticides, de plus en plus souvent interdits ou progressivement éliminés à travers le monde à cause de leur toxicité. Le paraquat, un herbicide jugé « hautement toxique » par les centres américains pour le contrôle et la prévention des maladies, est interdit dans l’Union européenne depuis 2007. Quant au chlorpyrifos, des études ont établi un lien entre ce pesticide et des retards de développement chez des enfants. Le glyphosate, lui, est jugé cancérigène.

18 000 procédures en cours aux Etats-Unis

Des associations d’agriculteurs et l’industrie chimique militent pour que le glyphosate, vendu sous le nom « Roundup » par Monsanto, filiale de Bayer, continue d’être utilisé. Plus de 18 000 procédures sont en cours aux Etats-Unis, où le produit est largement utilisé, les plaignants l’accusant d’être la cause de leur cancer. Le groupe Bayer a déjà perdu plusieurs procès.

L’Autriche fut le premier membre de l’Union européenne à interdire toute utilisation du glyphosate, en juillet. Des restrictions ont été décidées en République tchèque, en Italie, aux Pays-Bas et en France. Le Vietnam a interdit tous les herbicides contenant du glyphosate peu après les procès aux Etats-unis. Cette décision a été vivement dénoncée par le département américain de l’agriculture, selon qui elle va diminuer la production agricole mondiale.

Le ministère de la santé thaïlandais a salué l’« héroïque » décision de mardi sur sa page Facebook. Les agriculteurs thaïlandais sont très critiques, évoquant des augmentations de leurs coûts de production. « Si nous n’avons pas de produits chimiques pour éliminer les mauvaises herbes, nous devrons employer plus d’ouvriers », a déclaré Charat Narunchron, d’une association de fermiers de la province de Chanthaburi (est), qualifiant l’interdiction d’« injuste ». Le réseau de vigilance sur les pesticides a indiqué qu’il allait aider les agriculteurs à apprendre d’autres méthodes pour leurs cultures.

 

Source : Le Monde