La France a interdit samedi 15 mars 2014 par arrêté l’utilisation du maïs MON 810 de Monsanto, privilégiant le « principe de précaution » dans l’attente que la loi interdisant plus largement toute culture de maïs transgénique soit débattue à l’Assemblée début avril.

« La commercialisation, l’utilisation et la culture des variétés de semences de maïs issues de la lignée de maïs génétiquement modifié MON 810 (...) sont interdites sur le territoire national jusqu’à l’adoption (...) d’une décision définitive » et des mesures communautaires, stipule l’arrêté publié au Journal officiel.

Cette décision avait été annoncée le mois dernier par le ministre de l’Agriculture qui souhaitait sécuriser le débat entre pro et anti-OGM avant les premiers semis.

Le ton est déjà monté vendredi dans les Pyrénées-Atlantiques, avec l’occupation par une quarantaine de « faucheurs volontaires » du siège social de l’association générale des producteurs de maïs (AGPM), favorable au maïs OGM.

La météo clémente des dernières semaines a permis aux champs de sécher et les premiers semis de maïs ont débuté depuis quelques jours.

Or, si la France avait interdit le MON 810 dès 2008, puis de nouveau en 2012, le Conseil d’Etat, saisi par les pro OGM, a annulé le moratoire en août dernier, pour non conformité au droit européen, rouvrant la voie à son utilisation.

Le gouvernement est monté au créneau le mois dernier, avec un premier texte rejeté par le Sénat, puis avec une proposition de loi visant à interdire le maïs transgénique, adoptée en commission à l’Assemblée nationale.

Mais en raison de la pause parlementaire liée aux élections municipales, les débats ont été fixés au 10 avril, soit après le début des semis.

L’arrêté, s’appuyant sur l’« urgence » de la situation, estime que « le principe de précaution justifie l’adoption de mesures restrictives ».

- Risques graves pour l’environnement -

Le texte indique également qu’« au vu de données scientifiques fiables et de résultats très récents de la recherche internationale, la mise en culture de variétés de semences de maïs MON 810 sans mesures de gestion adéquates présenterait des risques graves pour l’environnement ainsi qu’un danger de propagation d’organismes nuisibles devenus résistants ».

Contacté par l’AFP, l’eurodéputé écologiste José Bové a salué la publication de cet arrêté, estimant que « c’était la seule façon de pouvoir interdire les OGM dans les champs en 2014 ».

« On voit bien que certains lobbies vont essayer de faire pression et d’attaquer cette décision mais ça ne changera rien pour cette année », s’est-il réjouit.

Vendredi, le directeur général de l’association générale des producteurs de maïs (AGPM), Luc Esprit, avait indiqué à l’AFP que les producteurs « respecteront le droit » et ne planteront pas d’OGM si cela est interdit même s’il jugeait que « les différentes solutions, si elles sont intéressantes pour les producteurs, doivent exister ».

Le MON 810 résiste à la pyrale, un insecte qui ravage les cultures, principalement en Midi-Pyrénées ou en Aquitaine.

Selon M. Esprit, il est exclu que « des producteurs se risquent à planter des OGM cette année au risque de devoir détruire leurs parcelles » une fois l’arrêté d’interdiction publié.

Reste, pour José Bové, la question de la pérennisation du cadre juridique au-delà de 2014.

« On voit bien aujourd’hui que la législation européenne n’est pas satisfaisante », regrette-t-il.

Le renouvellement d’autorisation du MON 810 est actuellement en cours d’examen par l’Union européenne, avec en parallèle des discussions pour revoir le processus d’évaluation des OGM.

Le compromis en discussion permet à chaque Etat d’interdire la culture d’un OGM sur tout ou partie de son territoire pour des raisons autres que la santé et l’environnement, comme l’ordre public, l’aménagement du territoire ou la lutte contre la dissémination.

Selon José Bové, « la commission cherche à amoindrir l’évaluation (des OGM) et renvoyer la responsabilité vers les Etats, ce qui aurait des conséquences dangereuses au niveau du doit international car chaque pays pourrait se faire attaquer par l’OMC (Organisation mondiale du commerce) ».

Source : Libération, avec AFP, 15 mars 2014