Les 12 et 13 février 2011, la commune du Thor (Vaucluse) a accueilli la troisième édition de la « Faites sans OGM ». Organisé par l’association Foll’Avoine et le collectif 1384 sans OGM (regroupant la confédération Paysanne, les Faucheurs Volontaires, les Amis de la Terre, ATTAC et le réseau Biocoop), le Forum International Anti-OGM a tenu toutes ses promesses : ateliers et débats ont rythmé un week-end convivial, riche en information et en rencontres entre différents mouvements de résistances mondiales aux OGM. 

Réunion de l’Association Nationale des Collectivités Sans OGM

La « Faites sans OGM » a débuté samedi matin par une réunion de l’association nationale des collectivités sans OGM.

En juin 2008, le Maire de Millau adoptait un arrêté d’interdiction des cultures d’OGM. Par la suite, il proposait la mise en place d’une association des collectivités sans OGM afin de faciliter l’échange d’expérience et de savoir-faire.

L’objet de l’association est de promouvoir et de défendre la biodiversité, l’agriculture de qualité, qu’elle soit « bio », labellisée ou simplement traditionnelle, face aux problèmes de disséminations transgéniques induites par les cultures et essais d’OGM.

Jacques Olivier, le Maire du Thor et Vice-Président de l’association, a rappelé les leviers d’actions des communes pour résister aux OGM :

-  Les vœux  : les communes peuvent prendre position contre les OGM sur leur territoire en votant une délibération. Le jugement du tribunal administratif de Nîmes en janvier 2009, validant la délibération anti-OGM de la commune du Thor, fait jurisprudence.

-  Les arrêtés municipaux  : l’agriculture ne faisant pas partie des compétences des communes, les arrêtés communaux interdisant les cultures d’OGM, sont systématiquement annulés par le tribunal administratif. Cependant, pour Jacques Olivier les communes doivent tout de même prendre des arrêtés pour faire « plus de bruit » qu’une simple délibération.

-  Du Bio dans les cantines  : les communes ont compétences sur les cantines. En organisant la fourniture d’alimentation biologique ou sans OGM aux cantines, les communes montrent leurs opposition aux OGM et promeuvent une agriculture de qualité respectant l’environnement et la santé humaine.

En conclusion, il a été conseillé aux communes de voter une délibération anti-OGM si ce n’est déjà fait et de prendre contact entre communes de leur département pour déposer un arrêté le même jour. Jacques Olivier a proposé aux communes de retirer les arrêtés attaqués et d’utiliser cet évènement pour communiquer largement (conférences de presse)  [1].

Un Forum International

Les organisateurs de la « faites sans OGM » ont rappelé que le fléau des OGM est un problème mondial et que les mouvements de résistances doivent, face à la puissance des firmes agrochimiques, échanger, s’allier et proposer une réponse collective.

Des invités internationaux de marque étaient présent, avec la participation Vandana Shiva (Inde), Percy Schmeiser (Canada) et Ana de Ita (Mexique), ont participé et animé les ateliers et débats du week-end. Ils ont tous les trois apporté leurs expériences de luttes et fait un état des lieux des cultures OGM dans leurs pays.

Vandana Shiva (Navdanya, Inde) a rappelé l’importance de préserver les semences anciennes et de promouvoir une agriculture préservant l’environnement. Pour elle, les OGM sont une atteinte aux libertés fondamentales, ne sont en aucun cas une solution aux problèmes de la faim dans le monde et n’ont aucun autre objectif que de « remplir les poches des semenciers » en brevetant le vivant. L’arrivée des semences OGM de Monsanto en Inde, a provoqué une vague de suicide de paysans indiens, qui, déjà fragilisés par des situations financières compliquées, n’ont pas supporté le surcoût lié à l’utilisation de semences brevetées nécessitant l’utilisation massive d’intrants. Pour Vandana Shiva, cette catastrophe (plus de 200000 suicides de paysans depuis 2000) est due aux mensonges de Monsanto aux paysans (meilleurs rendements, moins de pesticides à utiliser) et au manque d’indépendance de l’administration du pays, influencée et corrompue par la firme semencière.

Percy Schmeiser (agriculteur canada) a quant à lui rappelé son long combat contre Monsanto mené depuis 1997 et ponctué par une victoire en 2008. En s’appuyant sur cette expérience et la situation « catastrophique » de l’agriculture au Canada, il a encouragé les français à ne pas aller vers la voie des OGM. « Il faut avoir conscience du caractère irréversible de l’introduction des OGM dans notre agriculture. La coexistence avec une agriculture traditionnelle est impossible » a-t-il insisté.

Ana de Ita, (Réseau de Défense du Maïs, Mexique), a présenté le mouvement de résistance de la société civile mexicaine contre les OGM venus des Etats-Unis. Le Mexique, pays d’origine du maïs, compte des milliers de variétés de la céréale dorée. En 2001, malgré le moratoire sur les OGM déclaré par le Mexique en 1998, une étude de deux scientifiques Chapela et Quist, révélait la contamination du maïs traditionnel mexicain par les gènes Roundup Ready et BT. Depuis, le Réseau de Défense du Maïs se bat pour la sauvegarde de la biodiversité du maïs mexicain. Des paysans, chercheurs, journalistes, professeurs, entrepreneurs, se sont regroupés dans ce réseau pour lutter contre les OGM qui menacent le patrimoine mexicain.

Monsanto jugé coupable de crime contre l’humanité !

Le dimanche après-midi se tenait à l’auditorium du Thor un tribunal populaire chargé de juger la plainte portée par plusieurs organisations et citoyens du monde contre Monsanto.

La multinationale était accusée de crimes contre l’humanité. Le nombre de témoins à charge, la qualité de leurs interventions et les preuves apportées par les parties civiles ont convaincu les jurés.

Le jugement a été prononcé à 17h45 ce dimanche 13 février : l’entreprise Monsanto est jugée coupable de crime contre l’humanité avec préméditation. Le passé de multirécidiviste de l’accusé a alourdi la sentence.

Le tribunal a donc inculpé Monsanto pour crime contre l’humanité et l’a condamné :
-  Au démantèlement complet de son organisation
-  A verser l’ensemble de son capital dans un fond d’indemnisation de ses victimes
-  A des travaux forcés à perpétuité visant à réparer les dommages infligés à la nature
-  A rendre la nature indemne de toute pollution issue des manipulations génétique

Si ce tribunal populaire, le jugement et la sentence prononcés étaient fictifs, les témoins et plaignants étaient tous de véritables victimes de la firme Monsanto ou des personnes reconnues pour leur expertise sur le sujet. Les jurés ont été tirés au sort dans le public pour ajouter au caractère réaliste du procès.

Jean-François Chauvel
le 15 février 2011





[1A ce sujet, voir le guide « OGM et collectivités locales : comprendre et agir » de Inf’OGM