a. Description du produit.

L’hormone de croissance bovine, ou somatotropine, est une hormone naturelle que sécrète l’hypophyse des vaches après la naissance d’un veau et qui permet de stimuler la production de lait en mobilisant les réserves corporelles de la vache.

La somatotropine a été découverte en 1936 par une équipe de chercheurs soviétiques, qui essaya ensuite de la reproduire afin de stimuler la production laitière des cheptels, mais les techniques de l’époque ne permirent pas la production d’une hormone artificielle. A la fin des années 1970, des chercheurs de Monsanto réussirent à isoler le gène responsable de la production de l’hormone. Par manipulation génétique, ils réussirent à introduire le gène dans une bactérie, l’ Escherichia coli (ou « colibacille », bactérie commune qui peuple la flore intestinale des mammifères, y compris de l’homme), permettant ainsi sa fabrication à grande échelle. Cette hormone transgénique a été baptisée par Monsanto "Recombinant Bovine Somatotropin" (rBST), ou "recombinant Bovine Growth Hormone" (rBGH). Dès le début des années 1980, la firme commence à organiser des essais dans des fermes expérimentales lui appartenant ou en collaboration avec des universités comme celle du Vermont ou de Cornell.

L’injection de l’hormone deux fois par mois permet d’augmenter les rendements de production laitière d’au moins 15%, soit une augmentation moyenne d’un gallon, ou 3,80 litres, par jour. L’hormone rBST fut mise sur le marché sous le nom commercial de Posilac par Monsanto en 1994, après avoir été homologuée par la Food and Drug Agency (FDA).

b. Les effets secondaires du Posilac sur les vaches laitières.

La production forcée de lait au delà des capacités naturelles de la vache entraîne des effets physiologiques mettant en danger la vie de l’animal. Il faut comprendre que l’injection de l’hormone perturbe le cycle naturelle de la vache, qui produit de la somatotropine après une période de vêlage afin d’augmenter sa production de lait et nourrir son petit. Au fur et a mesure que le veau grandi, le production de l’hormone diminue mais aussi la production de lait. Dans une exploitation laitière traditionnelle, il faut donc inséminer la vache de nouveau pour relancer le cycle de production du lait. Mais l’injection de Posilac permet de maintenir artificiellement la fabrication de lait au delà du cycle naturel de la vache. Une des conséquences de la rupture du cycle est une diminution du taux de fécondité de l’animal allant parfois jusqu’à la stérilité (Voir le site du Parlement Canadien)

Une autre conséquence de l’injection de Posilac est l’augmentation significative des mammites, c’est-à-dire une inflammation des pis assez courantes dans les troupeaux à haut rendement, inflammation a pour conséquence la présence de pus dans le lait. D’après une étude réalisée par l’Université du Vermont sur un groupe test, le taux de mammites atteignait les 40% dans le groupe des vaches traitées avec le rBGH alors qu’il n’était que de 10% parmi le groupe témoin, qui ne recevait pas le traitement. Or la gravité des mammites se mesure par ce qu’on appelle la « numération cellulaire » (en anglais « somatic cells count » ou « SCC »). Pour évaluer l’état inflammatoire des pis, on dénombre les leucocytes ou globules blancs contenus dans le sang des vaches : si la numération cellulaire est élevée, cela signifie que l’on trouvera des traces de pus dans le lait.

Par ailleurs, ces problèmes de mammites ont une autre répercussion sur la qualité du lait car pour traiter ces inflammations, les agriculteurs ont recours à des injections d’antibiotiques dont des résidus se retrouvent dans le lait. Ces mêmes antibiotiques se retrouvent ensuite dans l’organisme du consommateur et participent au développement de souches pathogènes résistantes aux antibiotiques [1]

Dès 1983, la communauté scientifique s’était déjà alarmée de l’administration massive d’antibiotiques dans les élevages américains et avait fait parvenir une pétition à la FDA pour bannir l’usage des antibiotiques .

La liste d’effets secondaires est longue, comme l’indique Monsanto sur les emballages du Posilac , citons par exemple la possibilité d’observer « une augmentation des cas de cystite des ovaires et des troubles utérins », « une diminution du temps de gestation et du poids de veaux », « des montées de fièvres sans liaison à une maladie », « une augmentation des troubles digestifs comme des indigestions ou la diarrhée », ou encore « des lésions sur les pis » qui se constituent au niveau des points d’injection et entraînent parfois une nécrose des tissus… Enfin, l’un des plus terribles effets secondaires intervient en cas d’arrêt du traitement, car le Posilac agit comme une drogue, et en cas d’interruption la vache peut présenter des symptômes de manque pouvant entraîner sa mort, ce qui valu au Posilac la surnom de « crack des vaches »…

Aux Etats-Unis, un numéro vert d’assistance a été mis en place dès 1994 pour permettre aux agriculteurs de témoigner sur les difficultés liées à l’utilisation du rBGH sur leur cheptel. Un rapport détaillant ces problèmes a été rédigé par Mark KASTEL, dans lequel on trouve par exemple les témoignages de « Melvin Van Heel — 70 vaches dans le Minnesota — qui rapporte qu’il ne sait plus comment soigner ses bêtes qui souffrent de mammites et d’abcès énormes aux points d’injection ; Al Core — 150 vaches en Floride — constate que ses vaches ne peuvent plus marcher sous le poids des pis devenus énormes et qu’elles boitent à cause de blessures aux pattes et aux sabots ; de plus, trois vaches traitées ont donné naissance à des veaux monstrueux (pattes par-dessus la tête ou estomac à l’extérieur) ; Jay Livingston — 200 vaches dans l’État de New York — raconte qu’il a dû remplacer 50 bêtes — certaines étant brutalement décédées — et qu’après avoir cessé les injections, il a fait inséminer le reste du troupeau : 35 vaches ont donné naissance à des jumeaux, la plupart de très faible constitution.

A la vue de tous ces effets secondaires, affectant tant les animaux que les consommateurs de leurs produits, il est surprenant que la Food and Drug Agency ait donné l’autorisation de mise sur le marché de la rBGH. Cette homologation du Posilac parait être d’avantage une marque de soutien à Monsanto de la part de la FDA, que l’expression d’un réel souci de protection des consommateurs.

 

 

[1Eliot MARSHALL, « Scientists endorse ban on antibiotics in feeds », Science, vol. 222, 11 novembre 1983, p. 601.