Le ministère de l’agriculture a annoncé, mercredi 17 décembre, le renouvellement jusqu’en mai 2009 de l’autorisation d’utilisation de l’insecticide Cruiser, dont le retrait est réclamé par les apiculteurs et les associations de défense de l’environnement.

Cette autorisation "a été accordée à des conditions restrictives et sous réserve d’un renforcement du suivi de son utilisation, après un avis favorable de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa)", a fait valoir le ministère.

Le Cruiser est un insecticide utilisé dans la protection du maïs destiné à l’alimentation animale contre un insecte qui s’attaque aux racines, le taupin. Il avait reçu en janvier une autorisation de mise sur le marché de la part du ministère de l’agriculture pour une durée d’un an. Début décembre, des apiculteurs et des associations de défense de l’environnement avaient manifesté dans plusieurs villes lors d’une journée d’action nationale pour demander l’interdiction de ce pesticide.
La molécule active du Cruiser, le thiamethoxam, détruit le système nerveux des insectes. Le produit enrobe la semence et agit pendant la croissance de la plante. Or, ce type d’insecticide neurotoxique systémique, dont font aussi partie le Gaucho et le Régent, est soupçonné, par les apiculteurs, d’être à l’origine de l’affaiblissement des colonies d’abeilles constaté dans de nombreuses régions du monde. L’usage du Gaucho et du Régent sur le maïs est suspendu en France depuis 2004.

"EXTRÊMEMENT NÉFASTE"

Le ministère a assuré mercredi que les conditions de fabrication et d’utilisation du Cruiser, produit par la firme suisse Syngenta, "sont strictement encadrées". Ainsi, l’usage de ce pesticide sur une même parcelle ne sera possible qu’une année sur trois. Le ministère a en outre étendu le protocole de suivi de l’autorisation du Cruiser à six régions au lieu de trois en 2008. Ce protocole est "innovant en termes d’évaluation des impacts environnementaux d’un produit phytosanitaire", selon le ministère, et son pilotage "sera assuré par un comité placé auprès du cabinet du ministre, associant toutes les associations qui le souhaiteront dans le cadre d’un suivi régulier et transparent".

L’association de défense de l’environnement France nature environnement, souligne pour sa part que "l’Afssa a reconnu les risques de ce produit pour les abeilles, et demandé de nombreuses contraintes d’utilisation (faible densité de semis, utilisation une année sur trois...)". Cette autorisation est "scandaleuse, totalement malheureuse et contraire au principe de précaution", a précisé Arnaud Gossement, porte-parole de l’association. "Nous envisageons de saisir la justice", a-t-il également indiqué faisant allusion à un éventuel recours devant le Conseil d’Etat.

"C’est dramatique, cela va à l’encontre du principe de précaution, les abeilles seront des cobayes", a pour sa part déclaré Henri Clément, président de l’Union nationale de l’apiculture française. "Les apiculteurs envisagent de réagir au niveau juridique", a-t-il ajouté. "A un moment où la France se montre globalement exemplaire à travers le Grenelle de l’environnement, on voit que l’agriculture, qui est une part essentielle de la gestion de la biodiversité, échappe à l’engagement qui est pris par Jean-Louis Borloo", a de son côté commenté Allain Bougrain-Dubourg, président de la Ligue pour la protection des oiseaux.


Source :
 Lemonde.fr avec AFP, le 17 décembre 2009