Une nouvelle procédure en vigueur depuis le 1er mars pourrait faire évoluer les orientations de l’UE en matière d’autorisation d’OGM. L’avis des Etats membres aura plus de poids face à la Commission, s’ils parviennent toutefois à parler à l’unisson.

Depuis le 1er mars dernier, une nouvelle procédure de décision est entrée en vigueur dans l’Union européenne. Un nouveau règlement relatif à la manière dont les Etats membres contrôlent les décisions prises par la Commission européenne a en effet modifié les étapes décisionnelles entre les différents organes européens. Si ce règlement s’applique à de nombreux domaines comme le commerce ou la fiscalité, il s’applique également à certaines décisions prises dans le domaine de l’agriculture et de l’environnement. Les autorisations de mise sur le marché des Organismes Génétiquement Modifiés (OGM), qui comptent parmi les décisions les plus polémiques, en font parties.
Donner plus de poids aux avis des Etats membres
Conformément à l’article 291 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, la Commission européenne peut se voir déléguer le pouvoir d’adopter certaines décisions notamment en matière d’OGM. Jusqu’à maintenant, la Commission faisait ces propositions à un comité composé des représentants des États membres : le Comité permanent de la chaîne alimentaire et de la santé animale. En cas d’avis conforme, les mesures étaient adoptées. Si l’avis n’était pas conforme ou en l’absence d’avis, faute de majorité qualifiée, la Commission européenne faisait sa proposition directement aux ministres des Etats membres. En l’absence d’accord, la Commission devait automatiquement adopter la proposition qu’elle avait elle-même formulée.

Le vote à la majorité qualifiée Le vote à la majorité qualifiée est une procédure de vote employée par le Conseil de l’Union européenne pour la plupart de ses décisions. Depuis le 1er novembre 2009, la majorité qualifiée est atteinte lorsqu’une décision rassemble 55% des États membres, comprenant au moins quinze d’entre eux, et représentant en même temps au moins 65% de la population de l’Union.

Avec la nouvelle procédure mise au point par le Parlement Européen et le Conseil de l’Union Européenne, la Commission ne consulte plus directement les Etats membres via le Conseil et n’est plus contrainte de valider automatiquement sont projet. Elle présente toujours sa proposition au comité permanent. Si celui-ci s’oppose ou s’il n’arrive pas à donner un avis à la majorité qualifiée, la Commission peut désormais soumettre une version modifiée ou demander une nouvelle délibération à un "comité d’appel". Si le comité d’appel donne un avis défavorable, la proposition est abandonnée. En l’absence d’avis, la Commission pourra adopter son projet mais devra justifier cette décision.

"Cette nouvelle procédure doit désormais être confrontée à la pratique afin de voir si la Commission tient effectivement compte de la position des États", note l’association Inf’OGM. "Mais le vote à majorité qualifiée continue d’être la règle, ce qui laissera encore beaucoup de place à la Commission européenne", ajoute l’association spécialisée sur ces questions.

Bientôt un arbitrage national pour la culture d’OGM

Cette volonté de mieux prendre en compte l’avis des Etats membres notamment sur la question des OGM est également à l’origine de travaux de modification de la législation d’autorisation de culture. La Commission a proposé en juillet 2010 un règlement qui modifie la directive 2001/18 sur les OGM [1], afin de permettre aux Etats membres d’accepter ou non la culture d’organismes génétiquement modifiés (OGM) sur leur territoire. Les États membres seraient en mesure de restreindre ou d’interdire la culture d’OGM sur la totalité ou une partie de leur territoire sans activer la complexe clause de sauvegarde et pour des motifs autres que ceux fondés sur une évaluation scientifique des risques pour la santé et l’environnement. Les Etats pourraient invoquer des motifs éthiques ou socio-économiques.

La liste des critères d’interdiction ou de restriction fait encore l’objet de débat à la Commission européenne mais également au Parlement. Un rapport de l’eurodéputée Corinne Lepage (ADLE, Cap 21) est d’ailleurs en cours de discussion à la Commission de l’environnement.

Source : Florence Roussel, actu-environnement, 11 mars 2011