En juin dernier, Peter Brabeck, président du groupe alimentaire suisse Nestlé, a appelé l’Union Européenne à assouplir ses règles sur les OGM pour faire face à la montée de prix des matières premières agricoles.

“On ne peut pas nourrir la planète sans les organismes génétiquement modifiés”, a affirmé M. Brabeck, au quotidien britannique Financial Times.

Regrettant le manque d’engagement politique en faveur des OGM, il a ajouté que les OGM “sont une des technologies les plus sûres que nous ayons jamais vues, bien plus sûres que les aliments biologiques ou écologiques à la mode en Europe”.

Ainsi, non satisfait de faire la promotion de produits rejetés par près de 80 % des Européens, il se permet de critiquer une agriculture dont il semble méconnaître les qualités, aussi bien gustatives que sanitaires, tout autant qu’il ignore que de nombreuses et récentes études scientifiques révèlent que la modification génétique diminue la productivité des cultures.

Ainsi, selon l’Université du Kansas, le soja transgénique produit environ 10 % de moins que son équivalent conventionnel, et la récolte totale américaine dans les cultures de coton génétiquement modifié a décliné au fur et à mesure que la technologie transgénique se répandait.

L’étude la plus importante réalisée à ce jour sur les rendements agricoles est celle de l’International Assessment of Agricultural Science and Technology for Development, soutenu par l’ONU. Elle a conclu que les OGM ne pouvaient pas résoudre la pénurie alimentaire actuelle, comme le signale The Independent du 20 Avril 2008. Pour le professeur Bob Watson, qui a dirigé cette étude, “la réponse est simple, les OGM ne peuvent être la solution contre la faim dans le monde”.

En outre, le président du géant alimentaire helvétique a accusé l’Union européenne d’avoir fait “usage de pression politique en Afrique pour empêcher certains pays de ce continent d’utiliser des organismes génétiquement modifiés”, et que cette démarche “n’était pas forcément positive pour l’agriculture de ces pays ni pour leurs stocks”.

Peter Mandelson, commissaire européen au Commerce, a rejeté toute accusation de pression sur l’Afrique : “Elle est libre de planter ce qu’elle souhaite. Ceci dit, étant donné que la grande majorité de ses exportations en matière d’agriculture sont destinées à l’Union européenne, il est clairement dans son intérêt de tenter de rencontrer les besoins de ce marché.”

De toute manière, que l’on apprécie ou non les OGM, dans les pays où 80 % de la population vit avec moins de 2 dollars par jour, seuls des irresponsables peuvent prétendre que les semences sous brevet de Monsanto peuvent être une réponse à la pénurie alimentaire. Quant à l’Afrique du Sud, seule nation du continent africain à commercialiser des OGM, son attitude ne peut s’expliquer que par d’importants accords commerciaux.

Car, si le groupe Nestlé ignore bien des choses sur les OGM, il est un expert dans l’art des “mesures préventives pour contrer la hausse des matières premières”, comme Peter Brabeck lui-même l’a signalé. En pleine crise, Nestlé n’a pas attendu pour répercuter la hausse du cours du lait. “Les produits laitiers frais ont amélioré de manière significative leur rentabilité”. Il est certain que la “rentabilité” est le mot-clé pour l’industrie de la transformation laitière. Selon Agra Alimentation, la marge de cette catégorie de produits a progressé de 90 points de base et atteint 11,1 %.


Ainsi, 2008 s’annonce encore une excellente année pour cette industrie, avec 100 milliards de francs suisses de chiffre d’affaires et plus de 10 milliards de bénéfice net.

Source : Votresanté.org, par Sylvie Simon, le 2 décembre 2008