Deux évènements jettent le doute sur le processus d’homologation du Roundup.

Le premier remonte aux début des années 1980 : les Industrial Bio-Test Labs (IBT) de Northbrook, dont l’un des dirigeants était le docteur Paul Wright, toxicologue chez Monsanto recruté pour superviser une étude sur les effets sanitaires du PCB subit un procès retentissant pour manipulation d’études.
Or IBT, était l’un des principaux laboratoires chargés de la réalisation des tests sur les pesticides pour le compte en vue de leur homologation. En fouillant dans les archives du laboratoire, les agents de l’EPA ont découvert que des dizaines d’études présentaient de « sérieuses déficiences et incorrections », pour reprendre le langage prudent de la maison. Ils ont notamment constaté une « falsification routinière des données », destinée à cacher un « nombre infini de morts chez les rats et souris » testés .
Parmi, les études biaisées se trouvaient trente tests conduits sur le glyphosate [1].
« Il est difficile de ne pas douter de l’intégrité scientifique de l’étude, notait ainsi en 1978 un toxicologue de l’EPA, notamment quand les chercheurs d’IBT expliquent qu’ils ont conduit un examen histologique des utérus prélevés sur des… lapins mâles [2].
Après le scandale, l’EPA avait exigé que les tests incriminés soient « répétés », mais comme le soulignait en 1998 Caroline Cox dans le Journal of Pesticide Reform, cette « fraude jette une ombre sur tout le processus d’homologation des pesticides » [3]

Le second est plus spécifique au Roundup.
Les tests de toxicologie du produit, réalisés par Monsanto, ont porté uniquement sur le principe actif de l’herbicide c’est-à-dire le glyphosate et non pas sur l’ensemble de la composition chimique du produit.
Or chaque pesticide est constitué d’une « matière active » — dans le cas du Roundup, il s’agit du glyphosate — et de nombreux adjuvants, encore appelés « substances inertes », comme les solvants, dispersants, émulateurs et surfactants, dont le but est d’améliorer les propriétés physicochimiques et l’efficacité biologique des matières actives, et qui n’ont pas d’activité pesticide propre. C’est ainsi que les différents produits de la gamme Roundup sont constitués de 14,5 % à 75 % de sels de glyphosate, le reste de la formulation comptant une douzaine d’adjuvants principaux dont la composition est souvent gardée secrète. Le rôle de ces adjuvants est de permettre la pénétration du glyphosate dans la plante, comme le polyoxyéthylène (POEA), un détergent qui favorise la propagation des gouttelettes pulvérisées sur les feuilles . Le Roundup n’est donc pas seulement du glyphosate mais une composition chimique plus complexe, dont l’étude toxicologique n’a pas été réalisée et l’innocuité avérée. De fait une série d’études scientifiques récentes tendent à montrer que le Roundup pourrait être un agent cancérigène pour l’Homme [4] Pour plus d’informations, voir aussi la fiche Roundup





[1EPA, Office of Pesticides and Toxic Substances, Summary of the IBT Review Program, Washington, juillet 1983.

[2EPA, Data Validation. Memo from K. Locke, Toxicology Branch, to R. Taylor, Registration Branch, Washington, 9 août 1978

[3Caroline COX, « Glyphosate Factsheet », Journal of Pesticide Reform, vol. 108, n° 3, automne 1998, <www.mindfully.org/Pesticide/Roundup...> .

[4Anneclaire J. DE ROOS et alii, « Integrative assessment of multiple pesticides as risk factors for non-Hodgkin’s lymphoma among men », Occupational Environmental Medecine, vol. 60, n° 9, 2005.
.Anneclaire J. DE ROOS et alii, « Cancer incidence among glyphosate-exposed pesticide applicators in the agricultural health study », Environmental Health Perspectives, vol. 113, 2005, p. 49-54.
Julie MARC, Odile MULNER-LORILLON et Robert BELLE, « Glyphosate-based pesticides affect cell cycle regulation », Biology of the Cell, vol. 96, 2004, p. 245-249.
Julie MARC, Effets toxiques d’herbicides à base de glyphosate sur la régulation du cycle cellulaire et le développement précoce en utilisant l’embryon d’oursin, université de biologie de Rennes, 10 septembre 2004.