Le ministère de la justice américain a décidé d’enquêter sur les monopoles faussant la libre concurrence dans l’industrie agricole [Voir l’article http://www.combat-monsanto.org/spip.php?article464]. C’est au nom de l’Anti-Trust Act que le gouvernement Obama s’attèle à cette tâche. En tant que leader mondial du secteur des semences, Monsanto est logiquement la première cible.

État des lieux du secteur détenu par Monsanto

Monsanto contrôle 23% des semences conventionnelles et près 90% de la commercialisation des semences génétiquement modifiés (OGM) [1] et souhaite contrôler encore plus de marchés. A titre d’exemple, Monsanto aux Etats Unis détient 96% du soja OGM et 80% du mais transgénique [2]. On est loin ici des semences paysannes, fruit d’un travail d’adaptation et d’un long savoir faire. Monsanto, c’est aussi l’herbicide Round up, l’herbicide le plus vendu au monde et qui accompagne la technologie Round up Ready.

La firme de Saint-Louis prévoit une augmentation de 250% de ses bénéfices bruts entre 2007 et 2012 [3], soit des bénéfices entre 7.3 et 7.5 milliards de dollars US. Pour réaliser de tels profits, Monsanto continue à protéger ses brevets et à accroître sa domination sur le marché des semences.

Depuis 2000, elle a racheté une douzaine de compagnies semencières augmentant de fait la concentration dans le secteur des semences. [4] .
Or c’est précisément cette stratégie adoptée par Monsanto qui est contestée.

Monsanto dans le collimateur …du ministère de la justice

Ce n’est pas la première fois que le gouvernement états-unien est en désaccord avec les pratiques « hégémoniques » de Monsanto. En 2007, lors de l’acquisition de Delta and Pine Land, leader mondial du secteur des semences de coton, le ministère de la justice avait mis des freins, en exigeant que Monsanto se dessaisisse de sa branche américaine de semences de coton [5].

…de ses concurrents

Cette stratégie n’est pas non plus acceptée par les concurrents de Monsanto au premier rang duquel Dupont, second sur le podium du marché des semences, il détient 15% du marché mondial (conventionnel et transgénique confondus).

Dupont est actuellement poursuivi par Monsanto pour violation du droit de propriété intellectuelle sur la technologie Roundup Ready qui vise à rendre une plante tolérante à l’herbicide Roundup. Environ 75% des organismes génétiquement modifiés le sont dans le but de rendre la plante « tolérante » à un pesticide, c’est-à-dire que la plante absorbe un pesticide mais celui-ci ne l’a tue pas. Dupont est poursuivi car il souhaite vendre un soja combinant la technologie Roundup Ready en y empilant un autre gène modifié rendant la plante tolérante à un second herbicide.

A ce procès, Dupont a rétorqué par une demande de reconventionnelle (moyen de défense consistant à effectuer à son tour une demande à l’encontre de son adversaire) en indiquant que le refus de Monsanto de la technique consistant à empiler un autre gène de résistance à un herbicide ne visait qu’à asphyxier la compétition pour gagner plus de part de marché.

Dupont et la compagnie suisse Syngenta ont été entendus par la justice américaine à titre de témoins. Le vice président de Dupont, Jim Borel a déclaré que « Monsanto avait une longue histoire de recours aux contentieux et à des techniques agressives pour préserver son monopole et tenter en même temps d’intimider les consommateurs, ses partenaires et ses concurrents » [6].

… de la société civile

Une autre des pratiques débattues est celle de la « non fusion-fusion » c’est-à-dire les « copropriétés de brevets » qui se répandent dans le secteur des biotechnologies. Citons la collaboration entre Monsanto et BASF leader mondial des produits chimiques. Pour l’ETC group, ces collaborations permettent aux groupes biotechnologiques de consolider leur monopole mais sont contraires à la concurrence [7].

Les firmes agrochimiques comme Monsanto et Dupont se disputent pendant que d’autres préoccupations s’imposent auprès des paysans, des agriculteurs, des universitaires et des groupes de consommateurs.

Ceux-ci craignent de la montée du prix des semences, de la trop grande concentration dans ce secteur. Bill Wenzel directeur national de la campagne « d’agriculteurs à agriculteurs sur le génie génétique » nous dit « nous entendons beaucoup les agriculteurs se plaindre de la lourde hausse des prix et sur le fait que les semences non OGM n’existent plus ».

L’action du ministère de la justice va rendre prochainement ses conclusions qui seront l’occasion de voir si l’infiltration des administrations par les lobbies et par Monsanto en particulier est palpable aux États-Unis.

Nadège Le Mabec
Combat Monsanto, 16 octobre 2009.

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La concentration au sein de l’industrie semencière
Étude réalisée par Phil Howard, Professeur asssistant, Université d’état du Michigan/ Michigan State University





[4Pour s’en convaincre voir les schémas de structure de l’industrie semencière https://www.msu.edu/~howardp/seedindustry.html